Niap
Niap est une artiste multidisciplinaire reconnue pour ses dessins, ses oeuvres murales, ses sculptures et ses peintures. Née à Kuujjuaq, au Nunavik, dans le Nord-du-Québec, et fille aînée d’un père québécois et d’une mère inuk, elle était déjà attirée par les arts à un très jeune âge. Pendant que sa famille pratiquait la chasse et la pêche, Niap passait son temps à découvrir son talent artistique. Elle considérait déjà sa mère comme une artiste puisqu’elle aimait peindre à l’huile et décorer la maison.
Très imaginative, la jeune Niap portait une attention particulière aux détails et aux histoires qui l’entouraient. Même les tâches quotidiennes prenaient une tournure artistique. Kuujjuaq étant un petit village nordique, il ne lui était pas possible de suivre des cours en art. Elle se souvient qu’un jour, elle a même demandé un piano comme cadeau de Noël. Un souhait, encore une fois, impossible à envisager, compte tenu de l’accès restreint au Nord. Toute jeune, elle a commencé à pratiquer le dessin et elle fonctionnait beaucoup par observation ; ça, c’était accessible ! C’est d’ailleurs devenu une de ses formes d’art de prédilection.
Dans les années 1990, sa famille a déménagé à la campagne, à Saint-Lin-Laurentides, un village beaucoup plus au sud que Kuujjuaq. Cette période de sa vie n’a pas été facile. Puisque personne ne connaissait la culture inuit, elle a souffert de discrimination. À l’école, Niap se faisait intimider au quotidien, au point où elle a développé une honte de sa propre culture, qu’elle a cessé de partager avec son entourage. Lorsque ses amies étaient chez elle, par exemple, elle ne voulait pas que sa mère sorte le caribou ou le béluga comme nourriture. Elle refusait même de parler sa langue et préférait porter des vêtements achetés au magasin plutôt que ceux confectionnés par sa grand-mère.
Plus tard, à l’âge de 18 ans, elle a rencontré des Inuit du Nunavut à Ottawa, ce qui a provoqué chez elle une importante prise de conscience. Là, on pratiquait les chants de gorge, et on parlait ouvertement de culture et d’identité, avec une fierté que Niap n’avait jamais connue.
En 2005, Niap a participé à une marche qui allait changer sa vie, une marche pour la sensibilisation aux problèmes vécus dans les communautés autochtones. Elle a traversé le pays, de Vancouver à Ottawa, avec un groupe de jeunes autochtones et, pour la première fois, Niap a éprouvé un sentiment d’appartenance. Un parcours nécessaire puisqu’il a suscité chez elle un éveil spirituel qui lui a permis de réévaluer les moments difficiles de son adolescence, cette période où elle cherchait à savoir qui elle était vraiment.
Niap est retournée chez sa grand-mère, à Kuujjuaq, pour réapprendre sa langue et se réapproprier sa culture et son identité inuit. Afin de les faire connaître au reste du monde, d’assurer leur continuité et leur rayonnement, elle a réappris certaines techniques et modes de vie ancestraux. C’est alors qu’elle se lance pour de bon dans une carrière artistique et accueille les influences de sa communauté. Elle continue encore aujourd’hui à pratiquer le chant de gorge inuit, un art qui est devenu le premier élément du patrimoine immatériel du Québec.
Parmi ses oeuvres artistiques, Niap a créé en 2018 l’installation ᑲᑕᔾᔭᐅᓯᕙᓪᓛᑦ Katajjausivallaat, le rythme bercé, acquise depuis par le Musée des beaux-arts de Montréal. En 2017, le Musée canadien de la nature retenait un des dessins de Niap, qu’on lui demandait de recréer en une immense murale permanente, pour la galerie Arctique. En tant que comédienne, elle a joué le rôle d’une Inuk dans la série télévisée québécoise Épidémie, en 2020. Chaque jour qui passe, Niap continue de promouvoir la force et la beauté de sa culture, afin que les jeunes et les moins jeunes apprennent à célébrer la différence.
« Lorsque la vie est difficile, n’oublie pas que ce n’est pas pour toujours. Il faut persévérer. À un moment donné, tu te retrouveras toi-même et tu auras le droit de choisir ton propre chemin », a-t-elle l’habitude de dire.